Pochet : le flaconnage de luxe à l’ère de la décarbonation

Pochet a inauguré, en mars 2025, un four électrique sur son site normand de Guimerville. Ce four dernière génération s’inscrit dans une stratégie de décarbonation ambitieuse.

Les chiffres, tout comme l’envergure du four impressionnent. Sept mois de travaux, 4000 tonnes de béton, 100 km de câbles tirés, 500 tonnes de charpente et 10 km de tuyaux ont été nécessaires à la mise en place du nouveau four électrique de la Verrerie du Courval, site emblématique du groupe Pochet situé à Guimerville, au cœur de la Vallée de la Bresle, la vallée du verre française. 

Doté de trois arches électriques de cuisson et de feeder mix gaz et électrique, le four – le premier four électrique pour le flaconnage en France – dispose d’une puissance de 8 megawatts et d’un volume de plus de 250 tonnes de verre, soit l’équivalent d’un immeuble de trois étages, selon le verrier.

Le coût de la mise en place de ce nouveau four s’est élevé à près de 40 M€, un investissement soutenu par l’actionnariat familial privé du groupe Pochet et réalisé grâce à la participation de l’État avec le soutien de l’Ademe (agence du développement de l’emploi) et de la région Normandie.

Pour assurer le bon fonctionnement du four, 12 000 heures de formations internes et externes ont été déployées à destination des équipes techniques et Fusion en collaboration avec le verrier SGD Pharma situé à Saint-Quentin-Lamotte-Croix-au-Bailly, dans la Somme, et qui possède lui aussi la technologie de fusion électrique pour l’industrie pharmaceutique.

Cette formation, sur le terrain, avec l’opportunité d’appréhender un cycle de vie complet d’un four électrique sur le site de SGD Pharma, a participé au succès du démarrage du four du site de Guimerville. « Le fait que le démarrage du four est fluide et nous permet de produire déjà des flacons, et d’inaugurer le four un mois après le démarrage est à souligner », s’est félicité Xavier Gagey, président du directoire du groupe Pochet, le 14 mars 2025, lors de l’inauguration de l’installation. Quelques mois de tests de qualification du nouvel outil seront toutefois nécessaires. Ils seront réalisés en partenariat avec Fives, concepteur et fournisseur du four.

Objectif : 2033

« L’avantage du gaz, c’est qu’il chauffe très vite, très fort et refroidit très vite, très fort. Avec l’électricité, cela chauffe fort, lentement, et cela refroidit faiblement et lentement », explique Benoît Marszalek, directeur des opérations de Pochet du Courval. Dans une industrie où il faut de la flexibilité, l’inertie thermique peut ainsi représenter un frein. Mais qu’importe. Les équipes de Pochet sauront s’adapter. La feuille de route est claire : la création du premier four électrique de flaconnage de luxe en France représente une étape majeure du plan de décarbonation global de Pochet du Courval visant à réduire les émissions de 50 % d’ici à 2033 (par rapport à 2014). 

En fonctionnement depuis février 2025, le four électrique de Guimerville est plus efficient énergétiquement que les fours à gaz utilisés au sein de la verrerie. « Avec une capacité de 66 tonnes par jour, ce nouveau four permet de consommer deux fois moins d’énergie par tonne de verre fondue », précise Benoît Marszalek.

Le four sera alimenté en partie par l’énergie verte produite par la toute nouvelle centrale photovoltaïque de ABO Wind, acteur majeur du secteur des énergies renouvelables. Cette centrale, mise en service en janvier 2025, représente le plus grand parc photovoltaïque déployé par ABO Wind en France. Avec cet acteur, Pochet du Courval a signé un contrat d’achat d’électricité d’une durée de 20 ans. Un partenariat à long terme pour sécuriser les prix tout en garantissant un approvisionnement durable.

Un plan ambitieux

Au total, selon Pochet, 45 000 tonnes de CO2 seront économisées par an, dès 2033, à l’issue de son plan de décarbonation.

Les étapes pour atteindre cet objectif sont plurielles. Le plan du groupe Pochet a été décliné en quarante actions concrètes à déployer. Pour autant, l’une des étapes emblématiques sera sans doute le remplacement du four à gaz encore en activité sur le site de Guimerville. 

« Dans notre plan de décarbonation, un deuxième four électrique est prévu. Nous n’avons pas juste dit que nous souhaitions diviser par deux nos émissions de carbone d’ici à 2033. Nous avons défini les projets à mettre en œuvre et nous les validons au fur et à mesure. Le projet d’un deuxième four électrique a été validé », indique Benoît Marszalek. 

« Le groupe Pochet est une entreprise familiale. Nous avons la chance d’être soutenus par des actionnaires qui travaillent dans la durée », complète Xavier Gagey qui n’hésite pas à interpeller les pouvoirs publics pour un coup de pouce. « Pour assurer notre avenir, nous avons aussi besoin d’un cadre législatif stable, d’une simplification de nos process et surtout d’un coup d’électricité abordable. Aujourd’hui, c’est un vrai pari de basculer ce four de gaz à l’électricité dans le contexte actuel. Et il faut savoir que nos concurrents asiatiques américains payent l’énergie, qu’elle soit électrique ou gaz, entre deux et quatre fois moins cher qu’en France, alors que nous avons des installations nucléaires incroyables. Il est vital que l’État donne des signaux clairs aux industriels qui, comme le groupe Pochet, décarbone leur process avec force », a-t-il souligné lors de l’inauguration du four en s’adressant aux personnalités politiques présentes.